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Festival Kinani : Réflexions sur les opportunités et les défis du secteur de la danse en Afrique
A l’occasion de la 10e édition du Festival Kinani, qui a également servi de décor à la Biennale de la danse en Afrique, les programmes européens ProCultura et ACP-UE Culture ont conjointement organisé un panel de discussion intitulé « Danser en Afrique : mobilité internationale, formation et partenariats ». Cet événement – auquel cinq des artistes bénéficiaires des deux programmes – a permis d’aborder les défis et les opportunités auxquels sont confrontés les professionnels du secteur de la danse sur le continent africain.
La première partie du panel a permis d’explorer diverses facettes de la danse. Au-delà de son rôle en tant que divertissement et expression artistique, la danse est également un outil thérapeutique, un vecteur de transmission de cultures et de connaissances, ainsi qu’ un puissant outil pédagogique, de réhabilitation sociale et de revendications politiques.
Dans leurs pays respectifs, les intervenants utilisent la danse dans le cadre de projets communautaires. C’est le cas notamment de Khoudia Touré, chorégraphe et fondatrice de l’association Magg’Ando, qui a développé un projet de réhabilitation sociale cofinancé par le Programme ACP-UE Culture. Elle explique : « Au travers de mon organisation, Magg’Ando, nous intervenons régulièrement dans les établissements pénitentiaires en enseignant la danse aux détenus et en les aidant à créer des spectacles au sein des prisons. Dans une deuxième phase du projet, nous collaborons également avec des danseuses professionnelles pour initier et former les femmes d’une génération plus âgée. Notre objectif est de créer une synergie entre ces deux projets : offrir un accès à la danse aux communautés défavorisées et démontrer la puissance de la danse, tout en renforçant les compétences de nos membres en danse. C’est la logique qui guide notre approche. »
Au Zimbabwe, l’association Chenhaka Trust a mis en place un programme visant à professionnaliser les artistes danseurs, leur permettant ainsi d’atteindre une autonomie financière et d’optimiser leur pratique artistique. « Chenhaka Trust a pour vocation de répondre aux besoins du secteur et de créer un environnement propice à l’épanouissement des acteurs du secteur. Le projet que nous menons actuellement met l’accent sur le renforcement des capacités des danseurs. Cela vise également à assurer la préservation de leurs droits », précise Taurai Moyo, le fondateur de l’association.
Ainsi, une enquête menée au démarrage du projet a permis d’identifier les problématiques auxquelles le secteur est régulièrement confronté. « Le manque de professionnalisme, l’absence de références pour les salaires et les cachets des danseurs dans le secteur, etc., sont autant de problèmes que nous souhaitons résoudre « , confie Taurai Moyo.
L’émergence des réseaux professionnels
La professionnalisation du secteur de la danse sur le continent dépend entre autres de l’existence de réseaux professionnels. A ce titre, les technologies numériques offrent de nouvelles opportunités de communication qui ont le potentiel de faciliter la création d’un espace d’échanges virtuel, dans un premier temps.
« Durant la pandémie, nous avons eu l’idée de créer un projet de réseau virtuel, le Réseau de danse de la communauté des pays de langue portugaise. En tant qu’artistes, nous ressentions que malgré l’existence d’une organisation politique et économique entre les pays de langue portugaise, il subsistait d’importants écarts culturels, en particulier dans le domaine de la danse. Malgré certaines complexités, je crois que les pays concernés peuvent créer un espace plus solide, malgré les inégalités économiques, et tirer parti de la langue commune comme un point de communication et de partage de stratégies, tout en apprenant à mieux connaître nos pratiques artistiques », confie Djem Neguim, chorégraphe cap verdien.
En ce qui concerne le renforcement des compétences, des initiatives telles que les programmes ProCultura et ACP-UE Culture comblent certains besoins. Cependant, selon Djem Neguim, il est essentiel de concevoir des projets qui tiennent compte des réalités locales et des besoins concrets des acteurs culturels. À ce jour, de nombreux projets demeurent trop génériques et excluent les acteurs qui n’ont pas eu accès à une éducation formelle.
Les discussions se sont achevées sur la question cruciale de l’accès aux programmes de résidences artistiques, dans un contexte où la mobilité des artistes et l’accès aux financements demeurent des enjeux majeurs. Bien qu’il existe des initiatives louables qui soutiennent la mobilité des artistes et facilitent l’accès aux programmes de résidences, il est important de noter que leur accès demeure souvent limité.
Crédit photo: ©Festival Kinani